Juste pour rire, sourire ou réfléchir...

[Eric Joisel]

Un petit souvenir de Thoki ? Ça me fera plaisir...

Nous étions je crois en Allemagne, à Freising, banlieue de München, pour la convention. Paulo était encore président de l'assoc., qui marchait du feu de Dieu... Qui était "invité", qui ne l'était pas, je ne m'en souviens plus, mais il y avait foule, dont une belle brochette de cocottologues : Kunihiko Kasahara, Dave Brill et David Lister, des Russes, des Italiens, des Hollandais, accessoirement Floderer et moi, ...et bien entendu Thoki Yenn, le Danois le plus populaire de la "Origami world family" (comment ça, le seul ??? ). Il est décédé il y a quelques années.

IL EST ABSOLUMENT OBLIGATOIRE pour tout passionné d'origami (de maths et d'humour) de visiter son site :

http://www.britishorigami.info/academic/thok/thok.htm




Une couverture du magazine de la BOS qui lui est consacré • Son dessin fétiche, Kalmon • un de ses nombreux Kirigami
Sur la couverture, la molécule d'ADN (ou de DNA comme disent les British) que suggère Kalmon est un de ses modèles les plus connus.

Thoki devait déjà bien avoir dans les 80 ans, mais était en belle forme. Il nous fit rire aux éclats de bien des manières... Par exemple, tordant une simple feuille de papier en tous sens (mais sans un pli), il savait "mimer" un oiseau extraordinaire, qui déambulait et picorait, plus vrai que nature... Ou bien, n'aimant pas être pris en photo, il y eu un long gag entre David Lister et lui : chaque fois que David s'approchait de lui avec son appareil, il "tirait une gueule" de 8 pieds de long. Lassé d'attendre une bonne occasion, David posait son appareil, et le facétieux Thoki arborait immédiatement un large sourire. Ce manège se répéta pendant un bon 1/4 d'heure, avant que le brave M. Lister arrive à ses fins, profitant lâchement d'une inattention du Danois. Clic-clac ! Autre source de fous rire, sa langue natale (le danois), qu'il définissait comme une "maladie de la gorge", avec moult exemples.

Mais la gaieté peut vite faire place au drame : à la fin de la convention, émerveillés et ravis mais aussi claqués bien sûr, nous nous retrouvâmes un groupe d'une vingtaine de personnes dans une auberge, pour finir ce WE en beauté, peut être tout simplement pour ne pas se quitter déjà. Je crois qu'on pouvait dénombrer 14 nationalités autour de la table ! Thoki commença par transformer le menu (un A3 plastifié plié en 2) en une splendide Girafe, un de ses kirigami favoris ! J'enchaînais en chantant une comptine enfantine avec force gestes :

Dans sa maison (dessiner une maison ds l'espace) un grand cerf (les cornes),
Regardait (pare-soleil) par la fenêtre (dessiner un carré ds l'espace),
Un lapin (les oreilles remuent) venir à lui (moulinet avec les mains) etc...
(si vous la connaissez, chantez et mimez en même temps que nous)

Je la chantais tout seul en français, puis leur fis une traduction sommaire en anglais, et tous les membres de notre groupe de mimer tous les gestes pendant que je rechantais la chose une dernière fois. Thoki faisait de son mieux, mais vu son âge avancé avec un geste de retard... Nous avions de 30 à 80 ans à vue de nez, et le regard ébahi ou réprobateur des autres clients de la taverne était à pisser de rire ! Du haut de ses 80 printemps et tous ayant bu force bières, Thoki s'absente aux toilettes (normal). Nous continuons de plaisanter à qui mieux mieux, lorsque soudain UN GRAND BRUIT !!! Toute la tablée se retourne ! Thoki gît à terre, de tout son long. Tout le monde se précipite très effrayé : Thoki est "enveloppé", pour ne pas dire autre chose. De plus il est âgé et malade. Que lui est-il arrivé ? Il tente de nous rassurer, tandis qu'on le raccompagne à sa place. Mais nous sommes tous inquiets. Pour détendre l'atmosphère, ce diable de Thoki, juste après sa chute qui aurait vraiment pu être grave, en arrivant enfin à sa place (au bout de la table à la place d'honneur), entame un discours en restant debout, très officiel. Mais au lieu de parler réellement, il nous fait ça en strict MUET, comme si la chute avait cassé son élocution, du vrai Tex Avery. ...et les rires de fuser à nouveau...

Le virtuel d'internet, c'est pas mal, mais RIEN ne peut égaler le bonheur d'une convention bien organisée, avec des gens gais et généreux...

C'est tout pour aujourd'hui...

[Serge]

C'est toujours un régal de lire tes histoires, Éric ! Merci bien.

[Eric Joisel]

Pour ceux qui aiment ce que je dois bien définir comme mes conneries,
je rappelle que vous avez un site entièrement dédié à "ORIGAMI FUN" :

http://www.origamifun.info/index.php

Tenu par l'inégalable NICK ROBINSON, YEEEEEHH !!! Certes, c'est in english,
mais c'est complètement déjanté, avec des musiques, des animations,
et beaucoup de matière qui s'ajoute à une trentaine de mes histoires écrites ici.

A propos de Nick, il m'avait contacté il y a quelques temps, pour me demander
de faire son portrait en origami (Dieu sait pour quelle plaisanterie fine !).
Ça m'a rappelé que je l'avais déjà fait ! Mais le pliage en question a été kidnappé
(si, si !) il y a plusieurs années, ainsi que d'autres cocottes Joiseliennes,
par Joseph Wu et V'Ann Cornelius pour l'expo du musée Mingeï (si, si et si !!!).
Je l'avais oublié depuis...

[Eric Joisel]

L'ORIGAMI EN MILIEU RURAL...

C'était il y a une quinzaine d'années. A l'époque, je travaillais avec Michel Charbonnier pour la société "France Origami".
Nous "écumions" les grands centres commerciaux de France en y faisant de grandes expositions, avec les bêbêtes grandeur nature
de Gérard Ty Sovan ou les miennes. Gros budgets, et public TRÈS nombreux : ces expos duraient de 2 à 4 semaines,
et au cours du mois de décembre (approche de Noël donc) dans les plus grands centres, ce pouvaient être jusqu'à
100.000 personnes/jour (si, si) qui passaient devant nos cocottes ! Lorsque je dis que j'ai initié environ 500.000 personnes
au cours de 20.000 heures, c'est aussi surtout à cette époque, car "livré avec l'expo", il y avait un p'tit cocottologue de banlieue,
qui initiait gratuitement les bambins 8 heures/jour et 6 à 7jours/7 ! On me mettait sur l'une des places les plus en vue,
celle où il y a un haut-parleur pour couvrir la voix de l'animateur, et en général le manège avec l'auto de pompier
qui fait coin-coin. Si on veut vraiment connaître à fond le métier d'animateur, c'est le lieu d'apprentissage idéal...

Nous étions effectivement au mois de décembre, dans la banlieue de Limoges. Le centre en question avait de gros problèmes,
et fait exceptionnel, à cette époque où le centre commercial était supposé crouler sous les clients, il était quasi-vide.
Quand à mon atelier, qui dans les autres centres était plein à craquer en permanence, il restait désespérément vide.
Pour m'occuper (!) et justifier mon salaire, je donnais mes cocottes aux rares petites vieilles qui passaient, c'est dire !
Le manager du centre était désespéré : même les écoles n'avaient pas pu venir, pour d'obscures raisons de bus en grève...
Bref, ce "Joyeux Noël" était triste à pleurer ! La mort dans l'âme, ce brave homme (ils sont rares dans la profession
mais c'était le cas de celui-là) vient me raconter ses malheurs (un cocottologue, c'est un peu comme un confesseur),
et me demander une faveur : un seul et unique village avait répondu à l'invitation qu'il avait envoyé, mais ne pouvait pas se déplacer.
Est-ce que je pouvais y aller avec ma voiture, désertant pour la journée mon atelier, de toute façon à peu près vide.
Ainsi fut fait...

Me voilà parti. Heureusement que je ne suis pas comme Jean Yanne, qui "hais les routes départementales" ! Si il existe
un "cœur de la France très très profonde", c'est exactement là que j'allais. Aux routes départementales succédèrent
les chemins vicinaux, puis carrément les sentiers en terre battue. Un peu inquiet de m'être planté, j'arrive enfin dans un village,
on pourrait même dire un hameau. Un troupeau d'enfants poursuit ma vieille caisse poussiéreuse avec des cris de joie...
Puis ce sont les adultes qui sortent de la Maison Commune pour m'accueillir comme si j'étais Michael Jackson, OUAAAAIIISS !!!
avec fleurs et forces poignées de mains qui vous écrabouillent les mains. Un peu déstabilisé, j'ai à peine le temps
de garer ma voiture qu'on me pousse dans la Maison Commune.

Râââââââââââhhh !!!

Moi qui pensais enseigner 2 ou 3 cocottes à la classe unique du village, j'avale ma salive : TOUT LE VILLAGE
SANS EXCEPTION est là, à m'attendre impatiemment. J'évalue rapidement à plus de 200 personnes. Pire encore,
le Maire a fait dresser une petite estrade de 2 x 2 mètres AU CENTRE de cette grande salle, et TOUT AUTOUR,
on a consciencieusement installé des rangées de chaises dans les 4 directions : au nord les écoles (y compris les maternelles),
à l'est les ados, au sud les parents, à l'ouest les papys/mamys. Si on veut rendre IMPOSSIBLE le rôle de l'animateur,
c'est exactement comme ça qu'il faut s'y prendre ...et on attend que ch'te ga's-là d'la ville y fasse queuqu'chose...
J'ai oublié mon Prozac à la maison, et vu qu'en plus les gens s'impatientent, il faut que je démarre quelque chose, VITE.
Le plus raisonnable serait de faire un topo sur l'histoire du papier et une petite démo en pliant tout seul.
Mais les enfants ne supporteront jamais ça (peut être que ce public non plus)... Au cours de ma carrière,
ça m'est arrivé d'expliquer 2 pliages en même temps, pour pouvoir s'adresser en même temps aux enfants et aux adultes.
C'est épuisant, mais ça peut aller. Mais vu le public et la disposition des lieux, je battrais tous mes records...

Pendant 2 heures interminables, j'expliquerai 3 pliages en même temps (maternelles - enfants - adultes)
avec 3 papiers de couleurs différentes. "Vous m'écoutez "les Verts", orientez bien votre papier comme moi, vous..."
"Bon ça va être à vous "les Jaunes", écoutez-moi bien les Jaunes... ...pendant 2 TRÈS TRÈS LONGUES HEURES...
Je finirais complètement épuisé, et il faudra encore que je me traîne jusqu'à ma voiture et reprendre mes routes départementales
pour rentrer jusqu'à Limoges. Cruauté du public : quand je partais, il y eu quelques couples de vieux pour me dire :
"ch'est ben l'origumi, mais ch'est long !" Certes ils n'avaient plié que 2 malheureuses cocottes chacun, mais ils étaient incapables
de réaliser la performance que je venais de faire. Pas un merci, pas un compliment ! Et après cet exploit incompris,
je repartis tout triste et tout seul, tel Charlie Chaplin, sous une pluie froide, disparaissant lentement au fond de l'écran.

c'est tout pour aujourd'hui

[Mijka]

J'imagine la scène centrale et les villageois impatients... Joli concours de circonstances !

[Eric Joisel]

Ma dernière histoire était assez longue, et somme toute assez triste.
Pour me rattraper, une TRÈS TRÈS courte, mais TRÈS TRÈS bonne à mon avis :
On vient de me demander pour la énième fois par e.mail le CP d'un "Barbarian",
comme si ça pouvait suffire pour en réaliser un, les doigts dans le nez...
Ouaaah la crise, mort de rire !!!

[Yves Clavel]

Eric, j'aime l'histoire du CP Barbarian mais j'aime beaucoup "L'origami en milieu rural". Cela doit être un grand (et long) moment pour un plieur professionnel. Et je pense qu'il n'y en a pas beaucoup qui auraient tenu le choc d'une journée pareille. Et j'aime bien la comparaison de situation avec Chaplin car vous êtes tous les deux des artistes d'exception.

[ebesan2000]

Une nouvelle petite rubrique qui racontera des anecdotes plus ou moins drôles, plus ou moins croquignolesques autour de l'origami...

Ma petite anecdote : RECEPTION DE COLIS
Je voulais lâcher ce post comme on lâche un ... à propos de mon astuce pour voir la face cachée d'une personne.
J'vous raconte ;
Samedi soir, 23h, je fais comme certains d'entre vous une commande chez Origami-shop.
Trépignant d'impatience une minute après la finalisation, je résiste encore quelques jours.
Mais le jeudi arrivant, je n'en peux plus et m'en vais dés la pose de midi sans manger quérir des infos, auprès de mon nouveau relais, une charmante et élégante vendeuse, style bobo bien propre sur elle, afin de lui demander si par un heureux hasard mon colis était arrivé (sachant pertinemment que je n'avais encore reçu aucun SMS ni e-mail me le signifiant).
Elle me demande mon nom
-Eve MACHIN,
ainsi que le nom de l'expéditeur
-ORIGAMI-SHOP Madame,
Et là... Oohh Stupeur et Tremblements ! j'entends ces profonds et sombres mots, sortir de la gueule d'un Troll ou de je ne sais quel Baryton genre le démon entré dans le corps de Regan (Cf l'Exorciste) avec l'air de M.Oldfied en fond sonore ;
« c'est COA çA? »
Aaah ! Moa peur, petrifiée je réponds ;
« ben euh, c'est du papier et des livres M'dame (pas du papier Q, hein!) on plie et ça fait des trucs super génials...»
et là pour finir, j'entends ce son que je ne sais écrire, même en en onomatopée (peut-être PPPRRRRTT avec les lèvres closes d'où l'air tente de s'évacuer), voulant désigner un refus total de compréhension de mon interlocuteur qui visiblement n'en avait pas grand chose faire de mes histoires de papier .....................qu'elle avait en sa possession, là tout près de ses pieds !!!!
Bref au final, C'est que du Bonheur, j'ai mon colis et je suis heureuse !!
Tout ça pour dire que le chemin est encore long avant la reconnaissance, que dis-je, juste la connaissance de ce bel Art qu'est l'Origami...

[chtikechtakelaguelak]

Elle a même pas percuté que c'était le colis à ses pieds ?
Avec ce genre de personne faut pas chercher. Promouvoir l'origami je veux bien, instruire les imbéciles, non